fish under water

«Vos gueules, les mouettes ! » clamait un film oubliable des années 1970. Il aurait tout aussi bien pu étendre cette injonction aux poissons, qui ne font pas non plus dans la discrétion

Car l’éventail de leurs cris est encore plus varié que celui des oiseaux. Comme les mammifères, l’essentiel du boucan est produit au moment de la reproduction et pour marquer son territoire et certains, comme le poisson- crapaud, sont capables d’une variété de modulations et d’expressions égalant celle des singes.

Résultat, rien qu’avec les poissons, le bruit de fond de la mer est encore plus bruyant que celui que l’on peut avoir sur terre. Parce que le son se déplace plus vite, mieux et plus loin dans l’eau : comme c’est une onde qui fait vibrer les atomes, elle se transmet mieux dans le liquide où les molécules sont plus proches les unes des autres.

Si on n’entend pas grand chose lorsqu’on a la tête sous l’eau, c’est tout simplement parce que notre système auditif est fait pour saisir les sons dans l’air et pas dans l’eau. Les vibrations de l’air font vibrer notre tympan qui les transmet vers l’oreille interne. Sous l’eau, il devient plus rigide et ne peut pas aussi bien vibrer. De fait, c’est la boîte crânienne qui fait caisse de résonance, ce qui empêche de savoir exactement d’où vient le son puisque c’est l’écart des oreilles qui permet l’audition en stéréo, l’infime différence temporelle et de volume avec laquelle on reçoit l’information nous permettant de situer son origine.

En outre, notre système d’audition sous-marine est plus limité : à l’air libre, on perçoit des fréquences comprises entre 20 et 20 000 hertz alors que, sous l’eau, notre capacité est comprise entre 50 et 5 000 hertz, ce qui élimine forcément pas mal de sons.

Discothèque sonore

Mais si on n’a pas à se plaindre de l’activité vocale des poissons, ils ne peuvent pas en dire autant de nous. Comme voisin sans gêne, l’homme se pose là : entre les bateaux et autres engins flottants, auxquels il faut ajouter les prospections géologiques, il a fait de l’océan une discothèque au niveau volume sonore.

Les canons à air utilisés pour la prospection portent à plusieurs milliers de kilomètres sous l’eau, et ils perturbent fortement au moins les cétacés qui communiquent à longue distance et voient leurs cris recouverts par le bruit de ces canons.

L’acidification des eaux, consécutive au réchauffement climatique, aggrave le problème puisque cette acidité fait porter le son encore plus loin, surtout les moyennes et basses fréquences. On ferait mieux de la fermer avant de parler du monde du silence.

Jean-Luc Eluard

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