Pour multiplier les interactions avec une publication, mieux vaut qu’elle soit outrancière. Et qu’importe si ce qui y est dit est vrai ou pas…
Algorithme : ce drôle de mot a refait son apparition pour s’imposer en force ces dernières années, mais il est pourtant très loin d’être récent, ni même de dater des débuts d’internet ou de l’informatique. Il est ainsi apparu au… IXe siècle, invention du mathématicien Mohammed Ibn Musa-Al Khwarizm, qui lui a laissé son nom.
L’algorithme est un « ensemble de règles opératoires dont l’application permet de résoudre un problème énoncé au moyen d’un nombre fini d’opérations. Un algorithme peut être traduit, grâce à un langage de programmation, en un programme exécutable par un ordinateur », explique le Larousse. Plus didactique, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) complète : « par exemple, une recette de cuisine est un algorithme permettant d’obtenir un plat à partir de ses ingrédients ! Dans le monde de plus en plus numérique dans lequel nous vivons, les algorithmes mathématiques permettent de combiner les informations les plus diverses pour produire une grande variété de résultats : simuler l’évolution de la propagation de la grippe en hiver, recommander des livres à des clients sur la base des choix déjà effectués par d’autres clients, etc. »
Une lutte… théorique
Dans le cas des réseaux sociaux, les algorithmes fonctionnent à peu près toujours sur le même principe : ils mettent en avant un contenu qui va provoquer des interactions et susciter de l’intérêt, donc faire rester les internautes plus longtemps sur leur page. Or « l’algorithme qui recommande des vidéos ne se pose pas la question de savoir si ce qui y est dit est vrai ou non », assure Guillaume Chaslot, ancien salarié de Google et co-fondateur d’AlgoTransparency, qui sensibilise justement au fonctionnement des algorithmes. Selon lui, plus une vidéo est clivante, plus elle va susciter des commentaires donc être mise en avant.
Un sentiment partagé par des chercheurs de Facebook, dans une note rendue publique par le Wall Street Journal en 2019. Un an plus tôt, le réseau de Marck Zuckerberg avait intentionnellement modifié son algorithme pour en faire un espace où « les fake news, la toxicité et les contenus violents étaient excessivement partagés » selon ces chercheurs. Partis politiques et médias ont alors eux tendance à multiplier les propos « sensationnalistes et outranciers », pour reprendre les termes de ces mêmes chercheurs.
Mais, pointés du doigt notamment par une partie de la presse et de l’opinion publique, certaines plateformes ont annoncé faire évoluer leur algorithmes et même nouer des partenariats avec des médias pour chasser les fake news, comme le fait Facebook, en particulier sur les vaccins. Pourtant, malgré sa bonne volonté affichée, ce réseau, pas plus que Twitter ou Instagram notamment, ne parvient pas vraiment à endiguer les fake news. À cause des algorithmes ? De ceux qui les programment, surtout. Renoncer à ce qui indigne, met en colère, est excessif ou insultant, c’est renoncer à une partie de l’audience. Donc à une partie de ses bénéfices…
Retrouvez tous les articles de notre série sur l’esprit critique ici.
Jean Berthelot de La Glétais
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.