Consommer du sucre en excès est mauvais pour la santé. Mais le remplacer par des édulcorants pourrait accroître le risque de cancer, selon une étude scientifique publiée en cette fin mars

Obésité, diabète, problèmes cardiovasculaires, hypercholestérolémie, caries dentaires, etc., les effets délétères d’une consommation excessive de sucre sont nombreux. C’est pourquoi l’Organisation mondiale de la santé recommande d’en limiter sa consommation à moins de 10 % de l’apport énergétique quotidien.

Pour conserver le « goût sucré » convoité par les consommateurs et augmenter la saveur de certains aliments en diminuant la facture calorique, l’industrie agro-alimentaire a largement recours aux édulcorants artificiels : aspartame, acésulfame-K, sucralose… À valeur énergétique inférieure ou similaire à celle du sucre (4 kcal/g), ces additifs possèdent un pouvoir sucrant jusqu’à 600 fois celui du sucre blanc. Par conséquent, une quantité beaucoup plus faible suffit pour obtenir un goût comparable.

Un risque de cancer accru pour les plus forts consommateurs ?

Mais l’innocuité de ces « faux sucres » fait débat, notamment en matière de cancer, et les preuves épidémiologiques solides font défaut. Afin d’évaluer le risque de cancer lié à la consommation d’édulcorants, des chercheurs ont analysé les données de santé et de consommation d’édulcorants de 102 865 adultes français. Cette analyse a été menée dans le cadre de l’étude de cohorte NutriNet-Santé, par l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (EREN) entre 2009 à 2021. Différents instituts de recherche étaient impliqués : l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), l’Université Sorbonne Paris Nord et le Conservatoire national des arts et métiers (Cnam).

Publiés dans la revue scientifique PLOS Medicinele 24 mars 2022, les résultats de ces analyses statistiques font froid dans le dos. Ils montrent que, comparés aux non-consommateurs, les plus gros mangeurs d’édulcorants avaient un risque plus élevé d’environ 13 % de développer un cancer sur 8 ans, tous types confondus. Des risques plus élevés ont plus spécifiquement été observés pour le cancer du sein et l’ensemble des cancers pour lesquels une surcharge pondérale représente un facteur de risque, soit 14 localisations*.

D’autre part, une consommation plus élevée d’aspartame était associée à une augmentation de 22 % du risque général de cancer et de 15 % du risque de cancers liés à l’obésité, en comparaison aux non consommateurs.

Une alternative au sucre peu recommandable

« Ces résultats suggèrent que les édulcorants pourraient ne pas constituer une alternative sûre au sucre », souligne la docteur Mathilde Touvier, directrice de recherche à l’Inserm et coordinatrice de l’étude. « Nos travaux fournissent des données importantes pour leur réévaluation, en cours, par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et d’autres agences de santé publique », ajoute Charlotte Debras, doctorante et première auteure de l’étude.
Toutefois, de nouvelles recherches dans d’autres cohortes à grande échelle sont nécessaires pour reproduire et confirmer ou infirmer ces résultats.

*cancers liés à l’obésité : le pancréas, le foie, le côlon-rectum, l’endomètre…

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