Si certaines légendes font de l’huître un aphrodisiaque, on se demande bien pourquoi. En tous les cas, ce n’est pas son mode de reproduction qui peut provoquer l’émoi.
Pas de folles étreintes, tout se fait à distance et anonymement. Un Meetic naturel, en quelque sorte
La plus farouche, c’est la japonaise. La Crassostrea gigas, ou huître creuse, introduite en France dans les années 1970, se reproduit sans connaître le résultat. Lorsque la température de l’eau atteint environ 20 °C, la femelle lance ses gamètes dans l’eau avec ses valves et le mâle émet des spermatozoïdes en les expulsant avec ses cils.
Sacrée oeillade ! Tout ceci se rencontre dans l’eau et produit une larve qui vit d’abord sur ses réserves, puis se nourrit de plancton au bout de cinq jours.
Après 15 à 25 jours, elle se dote pour la première et dernière fois de sa vie d’un pied : elle devient pédivéligère.
Ce pied lui servira à ramper pour trouver le meilleur endroit où se poser et, ceci fait, il sécrète une sorte de ciment pour fixer la larve et disparaît. La larve est devenue un naissain, un bébé huître qui vivra près de trois ans tranquille avant de pouvoir être mangé.
L’huître plate (Ostrea edulis, l’huître traditionnelle locale, qui n’est presque plus exploitée) a une méthode à peine plus folichonne : le mâle, toujours aussi peu passionné, lance ses spermatozoïdes dans l’eau pour qui en veut, et la femelle les attrape au vol pour les féconder. Une fois ceci fait, elle expulse les larves de sa coquille, où elles connaîtront le même type de développement que les Crassostrea.
Changement de sexe
Mais ce qui étonne le plus dans cette reproduction plutôt neutre, c’est que les huîtres peuvent être alternativement mâles et femelles. Parfois au cours d’une même saison, mais plus souvent d’une année sur l’autre.
À partir du printemps, lorsque l’eau atteint 8 à 11°C, elle prend le sexe qui sera le sien pour l’année à venir. Mais l’on ne sait pas en fonction de quoi.
Tout juste a-t-on remarqué que plus elles vieillissent, plus elles ont tendance à devenir femelles : elles ne sont que 30 à 40 % chez les huîtres de un an et jusqu’à 70 %, passé 3 ans.
Mais il est une dernière catégorie d’huîtres plus malheureuse : les triploïdes, qui constituent 30 % des mollusques consommés, sont issues d’une manipulation génétique qui les rend stériles. Elles consacrent ainsi toute leur énergie à grandir plutôt qu’à batifoler, mais les éleveurs sont contraints de racheter des naissains tous les ans. On ne confond pas l’amour et les affaires.
Jean-Luc Eluard
Chronique réalisée en collaboration avec le Mag de Sud Ouest.
http://www.sudouest.fr/lemag/
Crédit photo : Pierre Baudier
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.