© ARCAION

Joyeux Halloween ! Chaque année, en début d’automne, de grosses araignées velues et hautes sur pattes « envahissent » nos maisons. Normal, il commence à faire froid et ces dames cherchent un logis douillet pour passer la mauvaise saison. C’est en tout cas ce que beaucoup croient, mais la réalité est tout autre…
Elles viennent copuler à 19h35 !

Si les hirondelles font le printemps, les araignées semblent sonner le glas de l’été. En cette mi-octobre, il n’est pas rare d’entendre retentir dans nos habitations les cris d’horreur des arachnophobes tétanisés à la vision d’une aranéide sombre, velue, et haute sur pattes, lancée à grande vitesse dans la traversée de la salle à manger.

Devine qui vient dîner ce soir ?

« C’est vrai qu’avec ses huit grandes pattes, elle court vite » sourit Christine Rollard, aranéologue au Muséum national d’histoire naturelle de Paris.« L’intruse est vraisemblablement une Eratigena atrica, une Tegenaria domestica ou T. parietina », autrement dit une des espèces de tégénaires des maisons, familières de nos habitations. Car contrairement aux idées reçues, les tégénaires ne « rentrent » pas chez nous lorsque les premiers frimas se font sentir… « elles y sont déjà ! Nos maisons sont leurs habitats ».
L’araignée colonise en effet de manière préférentielle les milieux abrités notamment ceux construits par l’homme. « Nos maisons, nos caves, mais aussi un puits ». En milieu naturel, on les trouve parfois à l’entrée des grottes. Inutile donc de lui faire prendre la porte, elle reviendra par la fenêtre ou tout autre ouverture puisque chez vous, c’est chez elle, ne vous en déplaise…

 « Chez nous, c’est aussi chez elles… »

Roméo attend sa Juliette à… 19h35

Quant on lui parle d’invasion automnale, Christine Rollard rigole franchement. « Quand on interroge les gens, on se rend compte qu’ils en voient rarement plus de deux/trois ! » Pas d’invasion donc, mais des rencontres non désirées effectivement plus fréquentes en automne qu’à d’autres périodes. Et pour cause : « il s’agit d’un Roméo à la recherche de sa Juliette ». La période automnale correspond au pic de reproduction chez cette espèce. Et si on l‘on croise Romeo à l’heure de l’apéro, c’est que « ces espèces ont une activité essentiellement nocturne. Les mâles se baladent donc plus facilement à la tombée du jour ». Des chercheurs de l’université de Gloucestershire (Royaume-Uni) ont même découvert, grâce à l’apport des sciences participatives, que c’est à 19 h 35 précises que ces araignées semblent les plus actives.

Si vous voulez éviter de vous retrouver nez à nez avec un mâle en goguette sur votre carpette, différez donc votre retour à la maison. Et si d’aventure, vous en croisez une, restez zen… « elle ne court pas vers vous, mais cherche au contraire à fuir le gros mammifère prédateur que vous êtes ». Zen, on vous dit. Ce n’est quand même pas la petite bête qui va manger la grosse, non ?

EN RÉSUMÉ :

  • Les tégénaires des maisons ne « rentrent » pas chez nous, elles y sont déjà.
  • Celles que l’on croise en automne sont souvent des mâles en goguette.
  • Ils ne sont pas à la recherche de proies, mais d’une partenaire ; n’étant ni l’une ni l’autre les humain(e)s ne les intéressent pas du tout…

Portrait-robot de l’intruse

La plupart des tégénaires croisées dans les maisons de Nouvelle-Aquitaine sont des Eratigena atrica. Cette espèce arbore une couleur brunâtre et présente deux bandes claires sur les côtés du céphalothorax et un abdomen brun à taches claires en séries. Le corps des mâles de cette espèce peut mesurer entre 10 et 15 millimètres, celui des femelles jusqu’à environ 2 centimètres.

Ces araignées tissent une toile en forme de nappe en soie non collante prolongée d’une retraite tubulaire cachée dans un trou de mur, derrière un meuble, dans la végétation. Les individus se déplacent sur la toile, c’est là qu’ils viennent capturer les proies qui se sont hasardées sur le piège. Elles sont saisies, paralysées puis consommées dans la retraite.

Alexandrine Civard-Racinais


A LIRE 

  • Un guide pour se débarasser (définitivement) de son arachnophobie : Je n’ai plus peur des araignées (Abdelkader Mokeddem, Christine Rollard), Dunod, 2018.
  • Un guide pour apprendre à reconnaître les araignées de nos régions et (pourquoi pas ?) les aimer : A la découverte des araignées (Alain Canard, Christine Rollard), Dunod, 2015.

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