Depuis le début du XXe siècle, les Français se sont adaptés à des exigences variables selon les gouvernements. Retour aux origines et aux sources de financement d’un régime de retraite ancré dans notre histoire

Voici plus d’un siècle que le yoyo sur l’âge du départ en retraite a commencé. De premières lois voient le jour en France sur les retraites ouvrières et paysannes. On les qualifie de « retraites pour les morts ». De fait, l’âge de retraite minimum est à 65 ans alors que l’espérance de vie ne dépasse pas 45 à 49 ans. C’est pourtant un premier pas. Si l’idée de compensation après une vie de labeur est apparue dès le XVIIe siècle, c’était à la seule la bonne grâce du roi pour une toute petite minorité tels que les marins et matelots. Au XIXe siècle, des sociétés de prévoyance sont créées pour certaines corporations mais sans intervention de l’État. 

Il faudra attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale, la faillite de certaines caisses professionnelles, pour que la volonté politique d’assurer à tous une protection sociale s’impose avec la création en 1945 de la sécurité sociale et de sa branche vieillesse. Le principe choisi est celui dit par répartition, c’est à dire basé sur une solidarité entre les générations. Les salariés en activité cotisent ainsi pour payer les retraites de leurs aînés. Chaque mois, l’argent circule immédiatement entre les actifs et les retraités et n’est pas stocké. 

En 1945, ces droits sont ouverts à l’âge de 60 ans et ce après 30 ans de cotisation (1). Si l’âge de départ à la retraite est ainsi plus clément qu’en début de siècle, le montant de la pension en revanche est maigre, ne représentant que 20% du salaire de référence et 40% à 65 ans. Ainsi, jusqu’aux années 70, de par la faiblesse du niveau des retraites, la population âgée fait partie des catégories les plus défavorisés. 

De l’âge d’or des retraités au durcissement

Dans l’effervescence des Trente Glorieuses et de la croissance, le niveau des pensions est relevé de 10% en 1971 mais la durée de cotisation passe de 30 à 37,5 ans. L’année d’après, pour élever le niveau des pensions, la cotisation à la retraite complémentaire devient obligatoire pour tous auprès de l’Argic, créé pour les cadres dès 1947 ou de l’Arrco fondé en 1961 (2). Coup de théâtre en 1983, sous François Mitterrand. On cotise autant (37,5 ans) mais l’âge de départ à la retraite régresse de 5 ans, pour descendre à 60 ans. Des conditions avantageuses vite stoppées dans leur élan.

Crise économique, chômage, augmentation de l’espérance de vie rabattent les cartes au tournant des années 90. Dès lors les réformes vont s’enchaîner pour augmenter la durée des cotisations : de 37,5 ans à 40 ans en 1993 sous Edouard Balladur, à 41 ans en 2003 sous François Fillon, jusqu’à une rupture très marquée à partir de 2010. La réforme Woerth relève l’âge légal de départ à 62 ans et reporte le départ en retraite à taux plein à 67 ans. Alors que les règles d’accès se durcissent, l’épargne par capitalisation est encouragée avec la création de produits tels que les Plans Épargne Retraite et fonds de pension proposés par les banques et assurances (3).  

La réforme Touraine, votée en 2014 sous le quinquennat de François Hollande, et celle prévue aujourd’hui par Emmanuel Macron posent un cadre encore plus exigeant avec une durée de cotisation de 43 ans en 2027 et un âge de départ à la retraite à partir de 2030 à 64 ans.

Un siècle plus tard, retour à la case départ ! Avec un bémol : une espérance de vie désormais de 85 ans pour les femmes et 79 ans pour les hommes. 

Comment la retraite est-elle financée ? 

La première source de financement est la cotisation sociale des salariés prélevée chaque mois, à laquelle s’ajoute la contribution patronale des employeurs. L’État également abonde par le versement de recettes fiscales tels que la CSG ou d’autres impôts. Les caisses sont aussi alimentées par le Fonds de solidarité vieillesse, la Cnaf et l’Unedic.

Ce n’est pas l’État qui s’occupe de verser les retraites mais diverses caisses. La plus importante est la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) pour les salariés du privé, les travailleurs indépendants, artistes…. On trouve aussi des mutualités agricoles, des caisses spéciales pour les fonctionnaires. Avec ce régime général, les retraités perçoivent 50 % de leur salaire moyen, lequel est calculé sur les 25 meilleures années de la carrière.  

Marianne Peyri

(1) L’âge légal autorise à prendre sa retraite. Les temps de cotisations, comptés en trimestre ou annuités, vont eux influer le montant financier de sa retraite. Si on part avant d’avoir le quota de trimestres validés, sa pension est réduite. Au contraire, si on part avec plus de trimestres que nécessaire, le montant de la retraite peut être bonifié.

(2) En plus des retraites dites de régime général, le retraité touche obligatoirement une complémentaire, basée elle aussi sur un modèle de répartition et négociée avec les partenaires sociaux. Tous les mois, l’employeur prélève une cotisation sur le salaire brut des salariés actifs, y ajoute une contribution et verse ces sommes à une caisse de retraite complémentaire. Le salarié accumule des points dont la valeur actuelle est 1,3498 €. Un salarié ayant acquis 4 000 points peut percevoir 5 400€ par an. Hormis pour les cadres, la complémentaire peut représenter entre un quart et un tiers du montant total de la pension. 

(3) Contrairement au modèle de solidarité par répartition, la capitalisation consiste à placer de l’argent à titre individuel dans des produits financiers afin de s’assurer une rente pour ses vieux jours. Le système de retraite de nombreux pays reposent sur ce système : États-Unis, Canada, Royaume-Uni, Suède…

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