Quel est le point commun entre les œufs des poulaillers domestiques d’Île de France et les poêles dans lesquelles ont les fait cuire ? La réponse tient en quatre lettres : PFAS. Cet acronyme désigne des substances chimiques artificielles largement utilisées depuis plus de 80 ans, notamment pour fabriquer des poêles. Comment se retrouvent-elles dans un œuf de poule ? Explications

La dernière alerte en date émane de l’Agence Régionale de Santé d’Île de France. Par un communiqué daté du 20 novembre 2023, l’agence demande aux populations des 410 communes qui composent l’agglomération parisienne de ne pas consommer les œufs de leurs poulaillers domestiques*. Et ce en raison des résultats d’une étude menée sur 25 poulaillers domestiques en Île de France. Celle-ci révèle une contamination généralisée des sols et des œufs issus de ces poulaillers par des polluants organiques persistants (POP), notamment par des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS).

Vous avez dit PFAS ?

Les substances per- et polyfluoroalkylés (PFAS) constituent une grande famille de plus de 4700 composés chimiques de synthèse. Leurs propriétés physico-chimiques de résistance aux fortes chaleurs, aux acides, à l’eau et aux graisses expliquent leur présence dans de nombreuses applications industrielles et dans une multitude de produits de consommation, comme les revêtements anti-adhésifs des poêles ou des casseroles, les vêtements imperméables, les vernis à ongles, les mousses anti-incendies ou encore… les emballages alimentaires.

Des polluants organiques persistants

En raison de leur stabilité chimique, les PFAS peuvent rester présents très longtemps dans l’environnement. C’est pourquoi ils sont classés parmi les polluants organiques persistants**, également appelés « polluants éternels ». 

Très mobiles, on les retrouve dans l’air, dans les eaux, et dans les sols. C’est là que les poules se contaminent. De manière directe « par l’ingestion de particules de sol contaminées lors de leur activité de picorage ou par inhalation (…) » ou de manière indirecte en « ingérant des vers et larves présents dans le sol, en s’abreuvant dans des flaques et nids de poule avec l’ingestion d’eau mélangée à des particules de terre ».

Des substances nocives pour la santé 

L’alimentation constitue la principale source d’exposition humaine aux PFAS et à l’ensemble des POP (plus de 90% de l’exposition totale). Pas de chance pour les propriétaires de poules, les œufs font partie des aliments les plus fortement contaminés avec le beurre, et les produits d’origine animale riches en lipides. Les résultats des analyses menées par l’ARS mettent en évidence des concentrations en PFAS supérieures aux valeurs réglementaires européennes*** pour la plupart des échantillons d’œufs.

Les PFAS s’accumulent peu à peu dans les tissus graisseux. Ils se distribuent majoritairement dans le foie, le sang, les poumons, les reins et les os avec des effets délétères sur la santé. L’exposition aux PFAS est également associée à une diminution de la réponse du système immunitaire à la vaccination, constituant, selon l’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) l’effet le plus critique pour la santé humaine.

Aussi l’ARS recommande-t-elle aux franciliens et franciliennes des communes concernées d’éviter la consommation d’œufs de poule issus d’élevage domestiques même si « la consommation d’œufs autoproduits reste néanmoins envisageable » sauf pour les enfants, les femmes enceintes et allaitantes. Et rappelle à tous, « qu’il est recommandé de varier son alimentation et ses sources d’approvisionnement pour réduire le risque de surexposition » aux PFAS et aux autres polluants organiques persistants.

Alexandrine Civard-Racinais

* Des études menées à Lyon et ses environs en février 2023 avaient déjà mis en évidence des concentrations élevées de PFAS, conduisant  le Préfet du Rhône à recommander l’arrêt de la consommation des œufs dans 16 communes. 

** Les POP comptent différentes familles de composés : les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), les dioxines (PCDD), les furanes (PCDF), et les polychlorobiphényles (PCB). 

*** La Commission européenne a mis en place des limites maximales pour les PFAS dans certains aliments, notamment dans les œufs, depuis le 1er janvier 2023. Ces teneurs maximales sont précisées dans le nouveau règlement (UE) 2022/2388. 

A lire  :

  • Foire aux questions – Contamination des œufs de poulaillers domestiques (ARS Ile de France).

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