Grâce au programme de sciences participatives « Qualité biologique des sols », les citoyens sont invités à recueillir des données utiles aux scientifiques sur la biodiversité des sols. Méconnus et pourtant cruciaux, les organismes vivants dans la terre déclinent à cause des pesticides et du dérèglement climatique. Le point avec Sandra Barantal, écologue des sols et coordinatrice scientifique de cet observatoire, à la veille de la journée mondiale des sols, le 5 décembre

Les sols abriteraient 59 % des espèces, selon une récente publication dans Proceedings of the national academy of Sciences. Cela fait d’eux l’habitat le plus riche en biodiversité de la planète. Il est aussi le plus diversifié.  

Les sols et leur faune et flore fournissent des services écosystémiques capitaux pour l’homme : filtration de l’eau et dégradation des contaminants, participation de 95 % à la production alimentaire mondiale, atténuation du changement climatique, contribution à la santé humaine (médicaments, vaccins, etc.), etc.

Les conséquences délétères des pesticides

Pourtant, cette biodiversité nous demeure relativement méconnue. Pire, l’homme la sabote. En effet, une méta-analyse d’études menées entre 1990 et 2018 publiée en juin dans Journal of Applied Ecology montre que les pesticides réduisent significativement l’abondance et la diversité de la faune des sols. À cette menace, s’ajoute celle du changement climatique.

C’est pourquoi le Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (CEFE) (université Paul-Valéry Montpellier 3) a lancé en 2022, avec différents partenaires (1), un programme de sciences participatives. Baptisé « QUBS » pour « Qualité biologique des sols », « il consiste, pour les volontaires, à recenser fourmis, mille-pattes et autres coléoptères, en ville ou à la campagne, dans son jardin ou en pleine forêt », explique Sandra Barantal, écologue des sols au CEFE et coordinatrice scientifique de l’observatoire.

La biodiversité du sol, essentielle à l’écosystème

La terre fourmille de myriades d’organismes vivants précieux pour le fonctionnement de l’écosystème : « ils assurent par exemple la fertilité des sols, le stockage du carbone, la purification de l’eau ou encore la prévention de l’érosion », énumère Sandra Barantal. QUBS recense pour l’heure trois protocoles (2).

« Le participant s’inscrit sur le site de QUBS, choisit son protocole, photographie les petites bêtes rencontrées et leur environnement, puis répond à quelques questions (notamment pour identifier les animaux collectés). Chaque observation est géoréférencée », explique la coordinatrice.

Comprendre les facteurs influençant la biodiversité des sols

Les quatre chercheurs impliqués dans le projet espèrent mieux comprendre les facteurs expliquant les différences d’abondance et de diversité des espèces des sols : niveau d’urbanisation, diversité du paysage, mode de gestion du sol (défrichement, etc.), pratiques (engrais ou non) ?

Pour l’heure, une centaine de personnes ont participé. « Ce n’est pas suffisant pour avoir une « photographie » fiable de la faune des sols », déplore Sandra Barantal.

Pour protéger cette biodiversité, la chercheuse livre quelques conseils : « favorisez une végétation locale, diversifiez les micro-habitats (feuilles mortes, branchages, etc.), couvrez les sols d’un paillage, évitez les pesticides… ». Il en va de notre survie à tous.

Florence Heimburger

(1) le Muséum national d’histoire naturelle, Sorbonne université, l’université de Lorraine/INRAE et les associations Noé conservation, l’Office de protection des insectes et de leur environnement et Plante & Cité.

(2)Les trois protocoles de QUBS :

  • le premier consiste à fournir un abri (une planche de bois brut ou une soucoupe en terre cuite) aux escargots ;
  • un autre vise à rassembler les organismes présents dans un carré de 25 cm de côté avec un aspirateur à bouche ;
  • le troisième permet de collecter les invertébrés actifs la nuit dans un gobelet inséré dans le sol.

Avec le soutien du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation

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