L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) vient de publier une expertise à propos du syndrome « aérotoxique ». Ce dernier serait dû à la pollution de l’air des cabines et des cockpits d’avions par divers polluants, mais il est pour l’instant difficile à caractériser, et son impact sur la santé des personnels navigants reste encore à déterminer

A la fin des années 1990, le britannique Chris Winder, professeur en toxicologie, et le chercheur français Jean-Christophe Balouet, qui s’intéressaient au problème de l’air contaminé à bord des avions, créent le terme « syndrome aérotoxique ». Il s’agit alors de désigner un ensemble de symptômes tels que des céphalées, des vertiges, des nausées, des irritations buccales et des voies aériennes supérieures touchant les personnels navigants. Et ce suite à des évènements d’odeurs, de fumées ou d’émanations observées dans les cabines des aéronefs.

Car l’air fourni au cockpit et à la cabine d’un avion en vol est, dans la grande majorité des cas, prélevé en partie au niveau des compresseurs des moteurs de l’avion. Parfois, cet air peut être contaminé par des composés issus des lubrifiants utilisés, et de l’huile moteur ou par des produits de décomposition issus de leur dégradation thermique. Dans le dernier cas, on parle alors de « fume event ».

Selon une étude menée par l’Université norvégienne de science et de technologie de Trondheim en 2015, ce type d’événement serait plutôt rare. Il surviendrait environ une fois tous les 5 jours.    

Odeur suspecte et symptômes après un vol

Pourtant, entre 2000 et 2021, 112 personnes ont rapporté auprès de centres antipoison la survenue de symptômes suite à des vols au cours desquels ils auraient perçu une odeur caractéristique de « chaussettes mouillées », de kérosène ou d’huile moteur dans l’habitacle.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), a donc été saisie en 2019 par plusieurs syndicats représentant les pilotes et les personnels de cabine afin d’apporter une expertise scientifique sur le sujet. Il s’agissait ainsi de faire toute la lumière sur ce syndrome aérotoxique qui affecte parfois le personnel navigant.

Le 11 octobre 2023, l’agence a publié les résultats de son expertise. Et elle est loin de pouvoir déterminer clairement l’origine et les impacts de ce phénomène. L’agence indique notamment ne pas pouvoir trancher en faveur de la reconnaissance d’un syndrome aérotoxique qui serait spécifiquement lié à l’exposition à divers polluants ou produits de décompositions moteurs dans les cabines des avions.

Des recherches complémentaires sont nécessaires

Dans son expertise, l’agence précise également qu’elle « ne peut conclure ni sur l’origine des polluants détectés dans l’air des cabines ni sur leurs niveaux de concentrations, en raison de données de qualité insuffisante ». L’ Anses préconise donc de procéder à des recherches supplémentaires afin d’identifier avec davantage de précision les effets de la qualité de l’air sur le personnel navigant.

En attendant, quelques solutions pour réduire ces épisodes de pollution de l’air intérieur existent. Selon le syndicat national des pilotes de ligne, il est par exemple possible de recourir à des filtres spécifiques pour traiter l’air introduit dans l’habitacle. Et à terme, des solutions plus couteuses comme le fait d’employer des compresseurs électriques pour la pressurisation et le conditionnement de l’air pourraient être envisagées.

Thomas Allard

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