Dans l’imaginaire collectif, les femmes sont connues pour être plus sensibles que les hommes. Crises de larmes, douleurs intenses, empathie démesurée… Et si cette idée reçue n’était rien d’autre qu’un préjugé sexiste ? Les explications de Catherine Vidal, neurobiologiste à l’Institut Pasteur

Les hommes sont forts et insensibles. Les femmes sont douces et fragiles. Préjugés ou véritable mode d’éducation, ces stéréotypes ont la vie dure. Après autant de temps à réserver les émotions à la gent féminine, on finit par se demander si cette différence a réellement une explication scientifique. Alors on a posé la question à Catherine Vidal, neurobiologiste et auteure du rapport “Prendre en compte le sexe et le genre pour mieux soigner” pour le Haut Conseil à l’Égalité.

« Ce sont des idées reçues qui datent d’extrêmement loin puisqu’on considérait que les femmes avaient, par nature, une constitution fragile. Elles étaient tout le temps souffreteuses, avec leurs problèmes de règles, tous les problèmes liés à l’appareil reproducteur. Et on pensait aussi d’ailleurs qu’elles avaient un cerveau qui n’était pas fait pour prendre des responsabilités, pour avoir une place dans la société équivalente à celle des hommes. » explique la neurobiologiste à l’Institut Pasteur avant de poursuivre. « La réalité de l’évolution sociale montre bien que les femmes et les hommes ont absolument les mêmes capacités cérébrales. Les mêmes capacités dans le raisonnement, dans l’intelligence, dans la créativité et dans la façon dont elles vont percevoir les choses aussi sur le plan émotionnel. »

Les femmes pleurent plus que les hommes : biologie ou norme sociale ?

Alors oui, les femmes pleurent 4 à 5 fois plus que les hommes, selon une étude de la société allemande d’ophtalmologie (DOG). Elles versent des larmes 30 à 64 fois par an en moyenne contre 6 à 17 fois pour les hommes. C’est un fait. La gent féminine pleure davantage. Mais ce n’est pas parce que leur cerveau est constitué différemment.

La neurobiologiste Catherine Vidal confirme. « Toutes les recherches qu’on fait maintenant sur le cerveau, depuis une vingtaine d’années déjà, il est clair que femmes et hommes ont les mêmes capacités cognitives, mais la façon de les exprimer, leur traduction sur le plan du comportement, va être influencée par les normes de la société sur le masculin et sur le féminin. »

D’ailleurs, jusqu’à 13 ans, filles et garçons pleurent tout autant. Ce n’est qu’à l’adolescence venue que l’écart se creuse. « Ce sont les normes sociales qui vont faire que les personnes sont influencées, la plupart du temps de façon inconsciente, à penser que si une femme pleure, c’est normal. Alors qu’un petit garçon, on lui dit  « Non, tu ne vas pas pleurer. » » Le masque de la masculinité se forge et se prolonge à l’âge adulte.

Les femmes sont plus sensibles à la douleur que les hommes

Les femmes ne sont pas non plus épargnées quant aux préjugés sur leur résistance à la douleur. Pourtant, encore une fois, sur le plan neurobiologique, aucune étude ne montre que les femmes ont un seuil de douleur différent des hommes. « Il n’y a pas un consensus parmi les neurobiologistes pour dire que les femmes sont, ou pas, plus sensibles à la douleur que les hommes. On ne peut pas faire des généralités pareilles. C’est le social qui est le facteur le plus important des différences femmes/hommes. »

Et pour cause, Catherine Vidal met en avant ces inégalités de santé dans son rapport “Prendre en compte le sexe et le genre pour mieux soigner” pour le Haut Conseil à l’Égalité.

Nolwenn Le Deuc

Avec le soutien du ministère de la culture.

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