Une étude britannique suggère que la maladie neurodégénérative est transmissible : plusieurs patients ayant reçu avant 1985 des injections d’hormones de croissance ont développé précocement une maladie d’Alzheimer. Les chercheurs invitent à la vigilance quant à la décontamination des instruments chirurgicaux

Le scandale de l’hormone de croissance ressurgit : au début des années 1990, 115 enfants étaient morts de la maladie Creutzfeldt-Jakob après avoir reçu, entre 1983 et 1985, des injections d’hormone de croissance élaborées à partir d’hypophyses prélevées sur des cadavres humains contaminés par des prions (des protéines infectieuses).

Aujourd’hui, une étude publiée dans la revue scientifique Nature Medicine fait état de huit patients ayant reçu avant 1985 des injections de cette même hormone de croissance, dont plusieurs ont présenté des symptômes de la maladie d’Alzheimer voire ont été diagnostiqués d’une forme précoce. Trois, âgés d’entre 47 et 57 ans, en sont morts, deux autres, âgés entre 54 et 57 ans, présentent des signes de déclin cognitif, sans qu’un diagnostic d’Alzheimer ait été posé. Quant aux trois patients restants, l’un présentait des symptômes répondant aux critères de déficience cognitive, un autre présentait des symptômes cognitifs subjectifs et le dernier était asymptomatique.

Lots d’hormone de croissance contaminés en bêta amyloïde, signature d’Alzheimer

Pour les chercheurs de l’Institut des maladies à prions de l’University college de Londres, les préparations d’hormone de croissance injectées à ces patients contenaient la fameuse protéine bêta amyloïde. L’accumulation sous forme de plaques dans le système nerveux central signe la maladie d’Alzheimer.

Ce peptide a d’ailleurs été retrouvé dans des lots qui ont été conservés, et sa transmission à des souris a été observée pour la bêta amyloïde. Et ce alors qu’elle était issue de deux échantillons ayant servi à traiter trois personnes incluses dans cette étude.

Alzheimer, transmissible comme les maladies à prions, telle Creutzfeldt-Jakob ?

Ces observations suggèrent, selon les chercheurs de l’Institut des maladies à prions de l’University College de Londres, auteurs de l’étude, qu’à l’instar des maladies à prions incurables, telle la maladie de Creutzfeldt-Jakob, la maladie d’Alzheimer peut revêtir dans certaines circonstances une forme transmissible. Ils soulignent « la nécessité de revoir les mesures visant à prévenir les transmissions accidentelles via d’autres procédures médicales et chirurgicales ». Et appellent notamment à s’assurer « d’une décontamination efficace des instruments chirurgicaux », écrivent-ils.

Toutefois, ils ajoutent que « rien ne suggère que la protéine bêta amyloïde puisse être transmise entre individus dans les activités de la vie quotidienne ».

Décontamination du matériel chirurgical

Les patients français sont-ils aussi concernés par les travaux britanniques ? Interrogé par Le Monde, Jean-Philippe Deslys, responsable de la recherche sur les prions au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) se veut rassurant : « La technique de purification utilisée pour les lots d’hormone incriminés au Royaume Uni était moins poussée que celle utilisée en France à la même époque ».    

Par ailleurs, en matière de décontamination du matériel chirurgical, les procédés validés sur les prions sont déjà mis en œuvre dans les hôpitaux, en particulier en neurochirurgie.

Florence Heimburger

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