Augmenter la durée du travail ? Le débat semble limité à la France. Partout ailleurs dans les pays occidentaux, on parle plus de la diminuer. Sans que cela ne nuise au pouvoir d’achat ni à l’économie. Et encore moins à l’environnement

Travailler plus pour gagner plus ? Un temps, ça a pu paraître séduisant. Mais dorénavant, la tendance de fond est à travailler moins. Pour l’environnement, le bien-être des salariés et même… pour le bien de l’économie. Parce qu’une chose est sûre au moins : on sait désormais que ce n’est pas en travaillant plus qu’on travaille mieux. Ni qu’on produit plus. Une étude de l’université de Stanford montre que le temps de travail idéal se situe en dessous des 40 heures hebdomadaires. Et que si l’on dépasse les 50 heures, la productivité diminue. Passé 55 heures, tout le travail supplémentaire est inutile.

Moins de travail plus de productivité

A l’inverse, même si elles sont toujours décriées, souvent pour des raisons idéologiques, les 35 heures ont permis un gain de production horaire de 4 à 5%. Et l’idée de lier baisse des horaires et hausse de la productivité est confirmée par les classements des pays européens qui travaillent le moins en moyenne : Pays-Bas (30 h/semaine), Norvège (33), Suisse (34), Allemagne (34,4), Irlande (34,5), Suède (35,8) ou France (36,1). Que l’on retrouve tous, ô surprise, dans les classements des pays à la meilleure productivité horaire : Norvège (1ère), Irlande (3ème), Pays-Bas (6ème), France (7ème), Allemagne (8ème), Suisse (9ème) et Suède (10ème).

Là encore, ce gain est à mettre à l’actif d’un mieux-être au travail provoqué par l’allègement des heures, mieux-être équivalent à la satisfaction ressentie lors d’une promotion. D’où l’idée pour beaucoup d’aller plus loin : semaine de quatre jours ou diminution à six heures de la journée de travail sont actuellement en test dans de nombreux pays. Le débat français sur l’accroissement de la durée du travail paraît bien passéiste.

En Grande-Bretagne, dont la productivité est bien moindre à celle de la France, un essai à grande échelle sur 60 entreprises pour 3 000 salariés est mené depuis 2022. Les premiers résultats sont très satisfaisants : 78% des employés sont plus heureux, 70% moins stressés et 64% plus productifs. Et les entreprises ne s’en sortent pas plus mal : 63% trouvent que la qualité du travail s’est améliorée, 51% enregistrent une baisse de leurs coûts et 62% notent moins d’arrêts maladies.

Moins de travail, moins de pollution

Voilà pour l’entreprise. Mais la société en général y gagne. Déjà, une vaste étude de l’OCDE soulignait que réduire de 10% la durée du travail faisait baisser de 12,1% l’empreinte écologique et l’empreinte carbone de 14,6%. En extrapolant les résultats de cette enquête, les chercheurs de la Henley Business School soulignent l’impact environnemental d’une telle mesure. Ils estiment à 9% la réduction du kilométrage hebdomadaire en voiture. En se fiant aux réponses des salariés passés à la semaine de quatre jours, les chercheurs ont estimé que les dépenses de santé diminueraient aussi fortement du fait du stress moindre et d’une plus importante plage horaire laissée pour des exercices physiques.

Moins de travail mais pas n’importe comment

Toutefois, la réduction pour la réduction n’est pas toujours la panacée comme l’a démontré l’échec relatif de l’expérience de semaine de quatre jours en Utah. En voulant concentrer en quatre jours les heures réalisées en cinq, cela a entraîné stress et désorganisation. Même si cela a permis d’économiser 12 000 tonnes de CO2. En outre, certains salariés vivent mal d’être en week-end durant trois jours et n’ont pas une approche positive de ce temps libre supplémentaire.

Diminuer le temps travail, même si c’est le sens de l’histoire, suppose de sortir des 250 années qui ont suivi la révolution industrielle où l’humain s’est souvent défini par son travail. Alors que faire du bénévolat, du travail dans l’intérêt général ou soigner son cadre de vie. C’est aussi du travail qui profite à la société, même s’il est volontaire. Et gratuit…

Jean Luc Eluard

Avec le soutien du ministère de la culture

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